Un jihadiste malien du groupe Ançar dine remis à la CPI
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Un jihadiste malien du groupe Ançar dine remis à la CPI

Un des leaders présumés du groupe islamiste Ançar dine, a été remis aujourd’hui à la Cour pénale internationale. Ahmad Al Faqi Al Mahdi originaire de la région de Tombouctou a été remis par les autorités du Niger à la CPI.

Il est soupçonné d’avoir pris part à la destruction en 2012 de mausolées dans la cité des 333 saints.
Cette opération de remise du suspect Ahmad Al Faqi Al Mahdi à la Cour pénale internationale est « une étape importante dans la lutte contre l’impunité, non seulement au Mali, mais aussi dans la région africaine du Sahel et du Sahara » annonce la CPI.
Ahmad Al Faqi Al Mahdi est accusé de « crime de guerre consistant à diriger intentionnellement des attaques contre dix bâtiments consacrés à la religion et des monuments historiques dans la ville de Tombouctou ». Membre important du groupe armé « Ansar Dine », il est également connu sous le nom d’ « Abou Tourab ». Selon la Cour Pénale Internationale, « Ahmad a joué un rôle prépondérant et actif dans le fonctionnement de la structure locale établie pendant l’occupation de Tombouctou par le groupe en 2012 ».
Originaire d’Agoune, à une centaine de kilomètres à l’ouest de Tombouctou, le mandat d’arrêt concernant Ahmad avait été émis le 18 septembre 2015. Toutefois, aucune précision n’a été donnée sur la date ou les circonstances de son arrestation.
« Les attaques intentionnelles contre des monuments historiques et bâtiments consacrés à la religion sont des crimes graves relevant du Statut de Rome – le traité fondateur de la CPI », a déclaré le procureur de la cour. « Un comportement aussi répréhensible ne saurait rester impuni plus longtemps », ajoute le premier responsable de l’institution.
Cette opération est la première mesure importante prise par la Cour Pénale Internationale dans le cadre de la situation au Mali et qui découle directement des enquêtes de la Cour.
Pour la première fois, la Cour Pénale Internationale va instruire un dossier concernant la destruction d’édifices religieux et de monuments historiques. Selon le procureur de la CPI, « ce travail sera poursuivi pour mettre en évidence la gravité de ces crimes de guerre avec l’espoir que ces efforts pourront contribuer à la prévention de telles exactions dans le futur ».
Selon le procureur général de la CPI Fatou BenSouda :
« Le peuple du Mali mérite que justice lui soit rendue pour les attaques contre ses villes, ses croyances et ses communautés. Que les choses soient claires : les charges portées à l’encontre de Ahmad Al Faqi Al Mahdi portent sur des crimes extrêmement graves; elles concernent la destruction de monuments historiques irremplaçables. Il s’agit d’une attaque contre la dignité et l’identité de populations entières, contre leurs racines religieuses et historiques. Les habitants du nord du Mali, principales victimes de ces attaques, méritent que justice soit faite.
C’est la première fois que mon Bureau, sur la base des éléments de preuve recueillis dans le cadre de ses enquêtes, porte de telles accusations contre un suspect devant la Cour. Nous allons poursuivre notre travail pour mettre en évidence la gravité de ces crimes de guerre avec l’espoir que ces efforts pourront contribuer à la prévention de telles exactions dans le futur.
Je suis reconnaissante aux autorités du Mali et du Niger pour leur coopération dans cette opération de remise ».

L’Association Malienne des Droits de l’Homme félicite les autorités nigériennes qui ont remis ce jihadiste à la CPI. Pour elle, « l’arrestation de Ahmad Al Faki Al Mahdi ne peut être qu’une bonne nouvelle ». L’AMDH estime aussi que c’est « un grand pas dans la lutte contre le terrorisme ».
Amadou Boubacar Tékété secrétaire général de l’AMDH est joint au téléphone par Ayouba Sow :
« Pour moi ce n’est pas une surprise. Je sais qu’un jour l’histoire va donner raison à ceux qui sont sur le droit chemin. Parce qu’une faute comme celle-là est une faute internationalement reconnue et condamnée. je félicite les autorités nigériennes parce que là, ils ont fait un acte de solidarité. Et, je ne peux que m’en féliciter parce que je crois que c’est une prise de conscience de la part de la société civile et des décideurs. C’est la justice qui peut approuver des accusations. En tout cas, c’est des accusations dont les fautes ne restent pas sans être sanctionnées. L’impunité est une mauvaise affaire. Il faut qu’on arrête l’impunité au niveau de l’Afrique. Parce que moi, je ne pense même pas que ça soit des religieux lorsqu’on va casser des mausolées. Là je crois que c’est tout à fait antireligieux. Moi, je crois qu’ils ont été guidés par le Satan et ils vont répondre de leur faute ».

Les habitants de Tombouctou se réjouissent de l’arrestation du jihadiste Ahmad Al Faki Al Mahdi et de son transfert à la CPI. Cependant, ils demandent que « les chefs jihadistes qui sont toujours dans la nature soient eux aussi arrêtés et traduits devant la justice ». Selon la population de la cité des 333 saints, Ahmad Al Faki n’était qu’un simple exécutant.
Un habitant de la ville sous couvert d’anonymat nous parle de Ahmad Al Faki Al Mahdi. Il est joint au téléphone par Ayouba Sow :
« Avant l’occupation islamiste, c’était un habitant de Tombouctou qui enseignait. Je pense qu’il doit même être un fonctionnaire de l’état malien. Quand la ville a été occupée, il a adhéré au mouvement Ansar Dine et je pense qu’il était du secteur de l’éducation. C’était lui qui contrôlait un peu tout ce qui se passait dans les écoles qui pouvaient ouvrir à l’époque. Il était aussi un indicateur. C’est lui qui dirigeait les islamistes vers les mausolées et cimetières. Il apparaît lui, à notre avis, comme un simple exécutant. On sait qu’il y a des gros bras des islamistes comme Iyad Ag Ghali, comme Sanda Ould Boumama et Ouka Ouka; qui ont fait les pires crimes et qui ont été libérés par les autorités maliennes. Je pense qu’il est mieux qu’il soit jugé par la CPI. Parce que si on l’arrêtait au Mali, les islamistes vont tout faire, même le MNLA, parce que c’est aussi un militant du MNLA, pour mettre la main sur deux ou trois militaires maliens et demander qu’il soit échangé ».