Bamako – groupes armés : le 2ème round des négociations s’ouvre aujourd’hui
Sur la table de négociation

Bamako – groupes armés : le 2ème round des négociations s’ouvre aujourd’hui

Bamako et des groupes armés maliens ont débuté à Alger un difficile deuxième round de négociations pour tenter d’amener la paix dans le nord du Mali. La première phase des discussions, en juillet à Alger, s’est achevée par la signature d’une « feuille de route des négociations ».

« Cette fois-ci à Alger, les participants vont aller au fond des problèmes et, je l’espère, obtenir un pré-accord », a déclaré l’ancien Premier ministre malien Modibo Keïta, représentant du chef de l’Etat malien à ces négociations.

L’enjeu est essentiel pour le Mali. La semaine dernière, six groupes armés notamment le MNLA, le HCUA,le MAA, la CPA, se sont retrouvés à Ouagadougou, pour signer un document scellant leur convergence de vue sur le point essentiel de la discussion à savoir un statut pour le nord du Mali.
Les signataires du document déclarent la « légitimité de la lutte que mène l’Azawad pour jouir d’un statut spécifique conforme à ses réalités géographiques, économiques, sécuritaires, sociales et culturelles ». À Bamako, on se dit prêt à écouter et entendre les revendications des groupes armés à une condition : que l’on reste dans le strict respect du principe de la souveraineté nationale et de l’intégrité du territoire.
Outre l’Algérie, l’Union africaine (UA) et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) feront partie des « médiateurs » des pourparlers d’Alger, tandis que l’Union européenne , la France, le Niger et le Nigeria seront présents comme « facilitateurs ».
Le Maroc, ne sera pas représenté. Selon des observateurs, les discussions pourraient durer de très longues semaines. Et le contenu du statut politique et juridique de l’« Azawad » réclamé par les groupes armés pourrait rapidement constituer un facteur de blocage.

Le gouvernement malien « espère parvenir à conclure un accord préliminaire de paix avec les séparatistes touareg dans un délai de huit semaines ». C’est ce qu’ a annoncé le ministre malien des Affaires étrangères avant l’ouverture de négociations en Algérie
Abdoulaye Diop a précisé que la première semaine serait consacrée à des discussions avec les différentes communautés, en particulier celles du Nord.

Pour beaucoup, les enjeux de cette 2ème phase des négociations à Alger sont de taille pour les parties, notamment pour Bamako . Ousmane Cornio, Spécialiste des questions de sécurité et gestion des conflits estime que l’enjeu réside dans la capacité à signer un accord durable :
« Le Mali va à Alger le couteau sous la gorge, comme toujours. Je crains d’ailleurs qu’on est une solution de peur, ou de cœur, plus qu’une solution de raison. On a besoin d’une solution de raison. Nous sommes en position de faiblesse sur le terrain. Ce qui fait que je crains, comme l’Accord d’Alger (en juillet 2006), le Pacte national (en avril 1992), qu’on accepte des choses inacceptables. Et je crois que cette fois-ci le Mali doit se ressaisir. Si peu soit-elle, la décision qu’on doit prendre doit être une décision courageuse dans laquelle on peut s’engager à long terme et qu’on peut réaliser. Mais il ne faut pas que, par la volonté de signer, qu’on signe des choses qui ne seront pas durables. Le statut particulier est une position, une proposition de départ de la négociation. La décentralisation renforcée ou poussée à travers la régionalisation, est une position. On ne négocie pas sur les positions, on négocie sur les solutions ».
Lors des négociation, les groupes armés comme ils l’ont annoncé vont revendiquer « l’autonomie ». Le gouvernement, lui, parle de « décentralisation renforcée ». Pour certains analystes, les deux peuvent aller ensemble à condition que l’autonomie soit axée sur la gestion des ressources et non du territoire.
Pr. Abdoulaye Niang est directeur du Centre de recherche d’études stratégiques « Sènè ».
« La décentralisation, selon le gouvernement du Mali, doit être approfondie ou renforcée selon une bonne gouvernance. Le problème à ce niveau c’est de savoir qu’est-ce que ça veut dire une bonne gouvernance ? Si c’est sur une mauvaise gouvernance économique et d’entreprise, il y a problème. Car la rébellion reviendra. Si nous prenons le concept de régionalisation, d’autonomie et de fédération, il y a ici une question de territorialité. Les groupes armés voient que la décentralisation du Mali, jusqu’à présent, c’est sur la base de responsabilité, mais pas sur la base de ressources conséquentes pour la mise en œuvre des responsabilités. En d’autres termes, nous partons dans un contexte global qui n’est pas très clair pour les deux parties. Le MNLA peut aller même à l’indépendance. Mais ça ne résout pas le problème des communautés de la localité des régions qu’il aura à administrer. Donc, le Mali n’a pas l’intégrité de son territoire. Il ne faut que les négociateurs aillent sur l’illusion que cela est le cas. Et malheureusement, tous les appels des intellectuels ferment les yeux la-dessus pour faire des déclarations politiques. Il faut discuter et renégocier le retour du Mali sur l’ensemble de son territoire ».