Après 55 ans d’indépendance, des maliens affichent leur déception
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Après 55 ans d’indépendance, des maliens affichent leur déception

22 septembre 1960 – 22 septembre 2015, le Mali a célébré ce matin ses 55 ans d’indépendance. La cérémonie a été marquée par le dépôt de gerbe de fleurs au monument de l’indépendance à Bamako, suivi de la prise d’armes à Kati. Pour certains maliens « Modibo Keita a vraiment libéré ce pays, mais après, il n’y a eu que la privatisation ». Ils estiment aussi « qu’un pays qui dépend de la langue d’autrui et qui n’a pas sa propre monnaie n’est pas indépendant ».

Le président Ibrahim Boubacar Keïta, dans son intervention hier soir sur la télévision nationale, a mis l’accent sur la nécessité de révolutionner le domaine de l’agriculture.
Ibrahim Boubacar Keïta au micro de nos confrères de l’ORTM :
« Avec une relative continuité, les gouvernements successifs ont eu à cœur de réaliser une révolution verte dont les ambitions se déclinent ainsi : couvrir totalement les besoins alimentaires du pays, produire de la matière première pour les besoins d’une industrie de transformation en construction, exporter les excédents de production et consolider nos échanges. Réussir un bon équilibre entre la formation et les progrès de la production. Ces ambitions restent à porter de main pour peu que les efforts consentis par l’état soient consolidés et qu’ils soient relayés sur le terrain par des producteurs engagés et volontaristes, ainsi que par les investisseurs privés. La subvention des intrants et des équipements agricoles a été portée à quarante cinq milliards de francs CFA pour la campagne agricole en cours contre quarante deux milliards à la même campagne 2014-2015. Un programme public d’aménagement est en cours d’exécution. Il porte sur cent mille hectares à mettre en valeur au cours de la période 2014-2018 ».

L’avis des populations diverge sur le bilan des 55 ans d’indépendance du Mali. A Bamako, certains pensent que le bilan est satisfaisant. Mais d’autres estiment totalement le contraire. Pour eux, « le Mali n’est pas encore indépendant ».
Écoutons les réactions des bamakois recueillis par Ayouba Sow :
« Le décollage vers le développement n’est pas encore acquit. Le phénomène de la corruption au niveau des élites, il faudrait vraiment aujourd’hui s’atteler à ça. Je pense que le Mali aujourd’hui ne devrait plus être là à tendre la main. Le Mali devait déjà avoir construit ses usines et être passé au niveau industriel. Notre agriculture devrait être beaucoup plus mécanisée. On avait prévu que le Mali soit le grenier pour l’Afrique de l’ouest mais malheureusement il n’est même pas le grenier pour lui-même ».

« Seulement pendant les huit années du premier régime, Modibo Keita a vraiment libéré ce pays, mais après, il n’y a eu que la privatisation. Aujourd’hui s’il faut faire un bilan des 55 années de l’indépendance du Mali, je crois qu’on a déjà tiré à terre. D’un côté, parce qu’un pays qui dépend de la langue d’autrui n’est pas indépendant. De deux, un pays qui n’a pas sa propre monnaie non plus n’est pas indépendant ».

« Juridiquement le Mali est indépendant. Parce que le Mali est membre à part entier des Nations unies, mais économiquement le Mali n’a jamais été indépendant. Militairement le Mali est sous soumission de la communauté internationale. Toutes les nations ont connu cette phase de domination. Demain le Mali va dominer ce monde. Parce que 55 ans ce n’est rien dans l’histoire d’un pays ».

Cette année, la célébration de la fête de l’indépendance intervient dans un contexte sécuritaire tendu après la signature de l’accord de paix. Certains acteurs de l’accession du Mali à l’indépendance estiment que le nord du pays a beaucoup souffert. Cependant pour eux, l’accord de paix est un compromis acceptable qui pourra contribuer à instaurer la paix au Mali.
Youssouf Traoré est un administrateur civil à la retraite, médaillé d’or de l’indépendance. Il est au micro de Barké Cissé :
« Aujourd’hui nous venons de commémorer le 55ème anniversaire de l’indépendance du Mali. Le nord du pays a beaucoup souffert, il faut arriver à dialoguer. Et concernant les accords aussi, il faudrait rappeler qu’il n’y a jamais un accord parfait. Tous les accords sont des compromis. Donc aujourd’hui l’accord d’Alger est un compromis, un compromis acceptable. Il faudrait que nous comprenions cela pour calmer les esprits et les cœurs. Arrêter les armes, arrêter les fusions de sang des innocents, des veuves et des orphelins à n’en plus finir pour que le Mali soit un et indivisible ».