<strong>Femme musicienne au Mali: entre mythes et préjugés</strong>
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Femme musicienne au Mali: entre mythes et préjugés

Le balafon, la Kora, le goni, le djembé, entre autres. Plusieurs instruments de musique étaient, autrefois, considérés comme réservés aux hommes. Mais aujourd’hui ce mythe a été brisé par des femmes qui excellent dans l’utilisation de ces instruments.

Née dans une famille musicienne, Sokona Yoro Diallo a eu l’amour des instruments dès le bas âge. Aujourd’hui la jeune dame qui joue le balafon et la guitare veut dépasser son père Yoro Diallo, un virtuose du « kamélé N’goni » et s’imposer comme une grande musicienne de renom. « je suis née et j’ai grandi dans la musique. J’ai vu que mes parents font de la musique. Mon père est musicien, ma maman aussi chante », explique Sokona qui étudie depuis quelques temps maintenant à l’institut national des arts INA. Une école qui a produit de grands noms de la musique malienne.

Trouvée dans une salle de l’institut national des arts, Mariéta Dembélé joue à la batterie. Véritablement investie, elle dénonce  les préjugés et les non-dits qui bloquent le développement et les carrières professionnelles des femmes dans le milieu. Beaucoup d’hommes pensent que nous les femmes, ne pouvons pas jouer des instruments. C’est pourquoi j’ai voulu faire de la musique », explique Mariéta Dembélé. Même si elle reconnaît qu’être musicienne n’est pas facile « J’ai rencontré beaucoup de difficultés liées notamment à la jalousie et la méchanceté dans ce domaine. D’ailleurs mes parents n’aiment pas que je fasse de la musique.  Il a fallu que je leur fasse convaincre par d’autres gens », dit-elle,

Les instruments de musique, chasse gardée des hommes

Dans la société malienne, auparavant, les femmes chantaient et tapaient des calebasses selon Moctar Koné président du Réseau des communicateurs traditionnels du Mali (Recotrade). Il affirme qu’aujourd’hui, elles jouent différents instruments de musique grâce à l’évolution du savoir et de l’éducation. « Du bolon, au balafon, à la guitare, la kora même le balafon. Les femmes jouent tous les instruments de nos jours. Ce qui n’était pas le cas autrefois. Mais cela a été rendu possible grâce à l’éducation ». C’est pourquoi des musiciens forment des femmes voulant apprendre à jouer des instruments,

Plusieurs idées reçues ou des mythes ont longtemps empêché aux femmes de jouer certains instruments. A Bamako, si certains se félicitent que ces temps soient révolus, d’autres continuent d’y croire « Ce sont les hommes qui jouaient les instruments et les femmes chantaient, On disait qu’une femme ne devait pas jouer des instruments de musique. Que ça pouvait lui porter malheur. Mais de nos jours, cela a changé. Et je pense que c’est bien que les femmes s’initient à tout, parce que de mon point de vue la femme peut faire tout ce que l’homme fait », nous confie ce jeune homme croisé dans une rue de Bamako. « J’ai appris que ce n’est pas bon pour une femme de jouer un instrument de musique. Même si certaines le font, moi en tout cas je ne suis pas pour », nous dit un autre habitant de la capitale.

La société s’adapte au changement

« La société malienne est partisane du changement, c’est pourquoi les musiciennes sont plus encouragées dans leurs professions » affirme Yacouba Dogoni Sociologue. « C’est plutôt un regard encourageant qu’on a sur les femmes qui jouent des instruments de musique. Vous pouvez constater que lorsque les femmes jouent dans les spectacles, elles sont plus applaudies que les hommes » fait-il remarquer. Il précise cependant que dans des localités encore conservatrices, « parfois c’est souvent difficile de concevoir qu’une femme joue des instruments musicaux qui étaient à, l’accoutumée, joués par des hommes ».

Le regard de la société n’est plus un obstacle pour la gent féminine de devenir musicienne. Mais selon Mamadou Sacko, professeur au département de musique à l’ INA, beaucoup de jeunes filles choisissent le chant au détriment des instruments « Elles se plaisent beaucoup plus dans le champ que les instruments tout en ignorant quand on se fait accompagner par un instrument on peut être beaucoup plus apprécié, surtout quand c’est une question du genre », explique le professeur de musique. Il ajoute que la facilité aussi peut expliquer le choix de certaines étudiantes « Jouer un instrument demande beaucoup plus de sacrifice, parce qu’il faut faire des répétitions perpétuelles et rester en contact permanent avec son instrument »

Aujourd’hui certaines femmes joueuses d’instrument arrivent à s’en sortir et ont réussi à créer leur propre orchestre composé uniquement de femmes.