L’insécurité favorise davantage la mendicité dans le pays
Des enfants faisant la manche en circulation. Bamako, le 15.02.24

L’insécurité favorise davantage la mendicité dans le pays

La mendicité est un phénomène récurrent dans notre société depuis belle lurette. L’insécurité, la pauvreté, la dimension traditionnelle et religieuse sont entre autres raisons qui expliquent l’accentuation du phénomène, selon des observateurs. Ils ajoutent par ailleurs, que ce fléau est alarmant et dangereux pour la société.

Reportage

Tôt le matin, dans la journée et même dans la soirée on aperçoit des enfants mendiants sur les grandes artères, au niveau des carrefours surtout dans les grandes villes. Ils se faufilent entre les véhicules à la recherche de nourriture ou de l’argent. Dans cette quête, certains sont victimes d’accidents de la circulation.

« Ce que je gagne en mendiant je le donne au maitre coranique. On étudie très tôt le matin, à partir de 8 heures, on commence la mendicité. A 14 heures nous retournons pour étudier encore en classe. Dans la matinée du mercredi, jeudi et vendredi, il n’y a pas d’études », nous dit ce petit garçon mendiant Ivoirien, envoyé à Bamako par ses parents pour étudier le coran chez un maitre coranique.

Cet autre petit garçon de 11 ans qui vit à Sikasso abonde dans le même sens.  « Nous venons en ville pour mendier. Ce qu’on gagne en mendiant, on le partage avec le maitre coranique », témoigne le petit mendiant.

Même son de cloche pour ce jeune mendiant envoyé par ses parents à Mopti auprès d’un maître coranique. « Tout ce que je gagne dans la mendicité, je le donne à mon maitre coranique. C’est une sorte de récompense, car il prend soin de nous », nous confie cet autre mendiant rencontré à Mopti.

Des chefs de famille témoignent et regrettent cette façon de faire des enfants mendiants. C’est le cas de Issiaka Traoré à Kadiolo. Selon lui, « après avoir remis un de ses enfants à un maitre coranique et payer des frais pour sa prise en charge, il l’a croisé en ville en train de faire la manche ». Notre interlocuteur affirme qu’il a retiré son enfant.  Cependant, Issiaka Traoré pense que la mendicité peut prendre fin par la volonté de tous les parents.

En plus des enfants talibés, des personnes vivant avec un handicap, des veuves, des personnes âgées font la manche en circulation. Pour d’autres aussi l’insécurité en est la cause principale. C’est le cas de Mme Déné Tembely, une déplacée à Bandiagara. « Nous nous sommes installés à Bandiagara à cause de l’insécurité. Nous avons des difficultés, une situation qui pousse certains de nos frères à la mendicité mais pas nos enfants », témoigne tristement cette jeune dame déplacée.

« Des enfants qui sont scolarisables mais se retrouvent dans la rue ; c’est déplorable. Aujourd’hui, ils gagnent 100, 200 et 300 francs CFA voire plus, quand ils auront 15 ou 20 ans, ils seront des brigands parce qu’ils n’ont rien appris à l’école », déplore Daouda Sacko, vice-secrétaire général de l’Association des Parents d’Élèves du Mali. Il estime également que « l’insécurité a beaucoup impacté la vie de nombreux enfants dans ce sens ».

Par ailleurs, Monsieur Sacko déplore le comportement des hommes et des femmes qui s’adonnent à cette pratique en exploitant les enfants. Pour lui, ce phénomène est synonyme de prise d’otage de l’avenir des enfants.

De son côté, les responsables du parlement national des enfants du Mali sont conscients des défis du fléau même si des efforts sont faits. Ils exhortent le gouvernement et tous les défenseurs des droits des enfants à plus d’engagement pour stopper la mendicité. Imbranhane AG Mohamed Elmaouloud, président du parlement des enfants affirme que sa structure fait « des sensibilisations et des plaidoyers auprès des autorités ainsi que de l’ensemble des acteurs intervenant dans le domaine de la promotion et de la protection des enfants pour mettre fin à ce fléau, qui touche beaucoup plus les enfants ».

Nos tentatives pour avoir la direction nationale de la promotion de l’enfant et de la famille sont restées vaines.

Comprendre la mendicité et comment venir en aide aux enfants mendiants, en cliquant dessous :